Enseignants affectés en administration centrale : point de situation février 2022

Nous vous devons un point de situation sur les discussions en cours sur la situation des enseignants affectés en administration centrale.

Comme vous le savez, la note de service du 11 novembre 2020 publiée au BO  du 3 décembre dernier  prévoit un bouleversement des conditions statutaires d’exercice des enseignants en administration centrale. L’annexe 1 de cette note de service, liée à la mise en place du système de gestion RH RenoiRH, impose dans sa partie V le détachement dans des corps administratifs et ITRF des enseignants exerçant leurs fonctions dans les services administratifs.


Une position syndicale claire : cette annonce maltraite les agents

La CGT a combattu dès son annonce ce dispositif. L’administration a maintenu ses positions malgré la très forte mobilisation des collègues avec une pétition signée par plus de la moitié des agents concernés ! Nous le savons maintenant, le problème est principalement technique : la gestion des corps enseignants dans le nouveau logiciel de gestion des ressources humaines n’a pas été prévue et l’intégration des corps enseignants dans RenoiRH d’ici à son lancement en janvier 2023 n’est pas réalisable au vu des délais (et de l’absence de volonté politique et budgétaire !). Autrement dit : aucun blocage réglementaire n’est opposable, mais seulement un problème technique… Nous l’avons dénoncé maintes et maintes fois. L’informatique ne doit pas présider à la façon dont sont traités les agents ! C’est ce que nous écrivions en octobre dernier (voir mail ci-dessous).

Sur l’appréciation de ces dispositions, la CGT n’a absolument pas changé de position. En revanche, nous ne pouvons que prendre acte du refus de l’administration de revenir sur sa position et des difficultés techniques réelles qui vont se poser à partir de janvier 2023 pour l’accueil des collègues enseignants. En l’absence de gestion dans un SIRH, ils ne pourront être payés, notamment pour la partie indemnitaire de leur salaire. Nous souhaitons donc faire face à cette réalité et avons tenté de trouver la meilleure solution possible : il faut sortir de cette impasse par le haut !

Un contexte juridique complexe et la proposition d’un protocole d’accord pour garantir la situation des situations des enseignants

Comme elle l’avait annoncé fin octobre, la CGT a lancé une consultation juridique. Elle a consulté son service juridique national et un cabinet d’avocat spécialisé en contentieux public. La réponse de notre conseil a malheureusement été claire : les arrêtés d’affectation des collègues ne tiendront pas face à la décision de l’administration de ne plus les accueillir sur des fonctions administratives, dans le respect de la lettre de leur statut. Nos camarades de Force ouvrière invoquent un arrêt Ternon sur le caractère opposable des arrêts individuels illégaux mais créateurs de droit. Cet arrêt permet effectivement de faire valoir comme un droit une situation existante, même si elle a été prise sur le fondement d’une base réglementaire erronée : au bout de 4 mois, l’administration ne peut plus rétroactivement remettre en cause les droits acquis par l’agent (cela vaut particulièrement pour protéger des agents d’une demande abusive de reversion d’un trop perçu passé un délai de 4 mois). En revanche, cet arrêt n’empêche pas l’administration d’abroger des décisions individuelles. En clair, le fonctionnaire est titulaire de son grade et non de son emploi : l’administration peut remettre en cause son affectation.

Notre conseil nous a cependant recommandé de proposer à l’administration la signature d’un protocole d’accord sur la situation des enseignants affectés en administration centrale. En effet l’administration a inscrit dans les lignes directrices de gestion (LDG) des éléments de garantie de stabilité de parcours des collègues enseignants au sein de l’administration centrale, malgré leur détachement. Mais la nature juridique des LDG pose question : ces LDG sont modifiables à tout moment par l’administration, après simple consultation du CTAC. Autrement dit, elles ne gravent pas dans le marbre les garanties que nous avons pu obtenir. En revanche, s’il est signé par la majorité des représentants des personnels et par l’administration, un protocole d’accord a un caractère juridiquement contraignant : c’est une nouveauté issue des ordonnances de février 2021. Il engage l’administration, est opposable et ne peut plus être modifié pendant toute sa durée de validité. C’est donc un texte de nature à nous offrir des garanties sérieuses.

La CGT a donc proposé avec le SNPTES le lancement de discussion en vue de la signature d’un protocole d’accord sur la situation des enseignants affectés en administration centrale (voir mail en PJ). L’objet de ce protocole est d’abord, comme exposé ci-dessus, d’offrir un texte de nature juridiquement contraignant pour asseoir a minima les garanties des LDG. Mais il peut également offrir des garanties supplémentaires, notamment en terme de reclassement et d’accompagnement des personnels. Lors du CTAC du 10 décembre, la CGT et le SNPTES ont présenté une motion demandant l’ouverture de cette négociation qui a obtenu une majorité au CTAC (CGT, SNPTES ? CFDT, ASAMEN – abstention UNSA et vote contre FO). L’administration a accepté cette proposition et acté le lancement de discussions.

En vue de la tenue de la première réunion de négociation, la CGT a formulé de nombreuses propositions (voir mail en PJ). Mercredi 9 février s’est tenu ce groupe de travail sur la base d’un premier projet d’accord présenté par l’administration. La discussion a été constructive, même si l’ensemble des propositions de la CGT n’a pas été reprise pour l’instant. La CGT va formuler des amendements et continue de se faire accompagner par son avocat pour expertiser la portée juridique des rédactions proposées par l’administration. Là-dessus le travail est encore en cours et nous ne manquerons pas de vous tenir informés de l’avancée du dossier.

De quelles garanties parle-t-on ? Analyse des premiers résultats obtenus

A la suite du CTAC du 10 décembre, les lignes directrices de gestion de l’administration comportent le paragraphe suivant dont la rédaction a évolué après intégration d’un amendement CGT / SNPTES :

« Les personnels des corps enseignants sont désormais accueillis par la voie du détachement, ils sont donc concernés par les présentes lignes directrices de gestion pour ce qui concerne leurs corps d’accueil. S’agissant de leurs corps d’origine, ces agents doivent se reporter aux lignes directrices de gestion ministérielles. Conformément à l’article 21 du décret n°85-986 du 16 septembre 1985 relatif au régime particulier de certaines positions des fonctionnaires de l’Etat, à la mise à disposition, à l’intégration et à la cessation définitive de fonctions, le détachement est prononcé pour une durée maximale de cinq ans ; il est renouvelable plusieurs fois, sans limitation de durée.

Les agents de ces corps qui au moment de leur placement en détachement étaient affectés au sein de l’administration centrale resteront donc dans cette position aussi longtemps qu’ils le souhaitent. Il ne sera mis fin à leur détachement qu’à leur demande. Le droit à l’intégration directe dans les corps d’accueil et dans le grade correspondant à leur grade dans leur corps d’origine leur est offert à tout moment dans les conditions prévues par les lois et règlements. »

Si la situation de détachement n’est pas celle que nous souhaitions, la discussion avec l’administration a permis d’obtenir deux garanties pour transformer cette position statutaire précaire en une position statutaire la plus pérenne possible :

  • Un détachement sans limitation de durée : le détachement des enseignants s’opère par détachement de 5 ans ce qui est la durée de détachement la plus longue que peut prononcer l’administration et il peut être renouvelé plusieurs fois sans limitation de durée
  • L’administration renonce à son droit de mettre fin au détachement de l’agent : les LDG disposent ainsi au sujet des enseignants affectés en administration centrale « il n’y sera mis fin à leur détachement qu’à leur demande »

L’intégration dans les corps de la filière administrative et ITRF est rendue possible à tout moment et est de droit ; la hiérarchie ne peut s’y opposer.

Les conditions de détachement ou d’intégration ont été clairement présentées dans le cadre du groupe de travail du 9/02 :

  • Pour les corps des certifiés / PE / PLP et assimiliés : l’accueil se fait à grade équivalent dans le corps des attachés, ainsi en classe normale = AAE, hors classe des corps enseignants = attaché principal, classe exceptionnelle = hors classe des attachés
  • Pour le corps des agrégés, l’accueil se fait dans le corps des IGR : classe normale = IGR classe normale, hors classe des agrégés = IGR 1ère classe, classe exceptionnelle des agrégés = hors classe des ITRF

Les sommets de grade sont équivalent dans chacun des corps qui sont effectivement comparables (la hors classe des attachés culmine à l’échelon spécial HEA3 comme celle des corps certifiés / PE / PLP et la hors classe des IGR culmine en HEB).

Le déroulement de carrière des enseignants peut être garanti à tous ceux qui optent pour le détachement, dans le cadre des mécanismes administratifs qui régissent la « double carrière » : les promotions acquises dans le corps d’origine sont automatiquement rebasculées dans le corps d’accueil. Ainsi les promotions de grade sont largement acquises à l’ancienneté dans le cadre des carrières des enseignants et donc plus favorables que dans les corps des attachés et des IGR. La « double carrière » garantie dans le cadre du détachement demeure ainsi la meilleure option pour continuer à bénéficier d’un déroulement de carrière le plus favorable possible dans les corps des attachés ou des IGR, une promotion de grade acquise dans le corps des enseignants étant automatiquement répercutée dans le corps des attachés ou IGR.

L’administration s’engage dans la première version du protocole à une réexamen indemnitaire systématique de l’ensemble des enseignants à l’occasion de leur détachement ou de leur intégration. Leur est ainsi garanti le moyen a minima de leur niveau indemnitaire et l’ajustement au minimum au plafond de gestion du corps d’accueil si celui-ci est supérieur à leur niveau indemnitaire actuel. Une possibilité de transfert d’une partie de leur prime de fin d’année sur l’IFSE (part mensuelle) est également possible si cette prime de fin d’année est jugée trop élevée par rapport à la prime versée mensuellement et si l’agent en fait la demande pour qu’elle soit soclée dans sa prime mensuelle.

Enfin l’administration garanti un accompagnement des collègues enseignants qui souhaiteraient retourner devant élèves. Ainsi le retour dans le département d’origine pour les professeurs des écoles et dans l’académie d’origine pour les professeurs du second degré est garanti (et constitue une règle de gestion commune). Mais l’administration s’engage à accompagner également les enseignants qui souhaiteraient obtenir une autre académie ou un autre département à les accompagner en dehors du mouvement interacadémique ou départemental.

Actuellement la négociation bute malgré tout sur plusieurs points que la CGT a défendu :

  • Le périmètre de négociation ne concerne que les enseignants affectés en administration centrale (102 enseignants au 1er janvier 2022) et non les futurs entrants. Ce point est une vraie limite dans la négociation et ne permettra pas d’offrir les mêmes garanties de stabilité aux futurs enseignants qui rejoindront l’administration centrale dans le cadre d’un détachement
  • La CGT a également demandé que les situations des enseignants actuellement détachés puissent être revue, notamment pour les agrégés détachés dans le grade des attachés principaux, situation moins favorable que celle que propose le protocole. Le point est en cours de discussion.

La CGT a demandé que le réexamen indemnitaire se fasse non pas avec la garanti du plancher des corps d’accueil mais a minima au niveau de la moyenne du corps d’accueil, notamment pour les enseignants ayant une grande ancienneté générale de service. Pour l’instant la discussion n’a pas encore permis d’avancer sur ce point.

Et maintenant que va-t-il se passer ?

Le calendrier commence à être contraint, les mouvements intra-académique et intra-départementaux nécessitant des inscriptions au printemps. Le SAAM nous a annoncé qu’il allait envoyer très prochainement une note de service avec droit d’option début avril. Cette note de service s’inscrira dans les garanties offertes par les LDG. Pendant ce temps, les négociations sur l’accord se poursuivent : le SAAM part du principe que l’accord, s’il est signé, offrira des garanties au minimum aussi favorables que les LDG qui peuvent donc servir de base à la proposition d’option faite aux enseignants.  Il a par ailleurs été confirmé que les CPE n’étaient pas impactés par le mouvement puisque leur statut prévoit des fonctions administratives et qu’ils pourront être gérés dans RenoiRH.

La CGT vous tiendra informés des avancées des discussions. D’ici là, nous pouvons aussi répondre à toutes les questions sur vos situations individuelles, n’hésitez pas à nous solliciter. Mais nous allons vous proposer prochainement une AG, sans doute avec le SNPTES.

Nos constats à ce jour :

  • Paradoxalement la situation d’intégration, si elle est plus stable, est potentiellement moins favorable au déroulé de carrière. Elle n’est in fine recommandée qu’en fin de carrière, notamment une fois obtenu l’échelon spécial de la classe exceptionnelle.
  • La double carrière est donc, dans le cadre du détachement garanti sans révocation possible par l’administration et sans limitation de durée, la situation la plus favorable au déroulement de carrière