Emmanuel Macron n’est pas au service de l’intérêt général. Aujourd’hui, il s’attaque au statut des fonctionnaires en proposant :
- Plus de contractuel·le·s dans la fonction publique, plus de suppressions de postes, plus d’externalisations de services publics
- Plus d’inégalités dans les rémunérations et les carrières, plus de mobilités contraintes, moins de démocratie sociale
Tout ça veut dire moins de droits pour les agents, et moins de services publics au service des citoyennes et des citoyens :
- Vous voulez moins de pouvoir pour les représentants ? (article 1)
Cet article prévoit de soustraire à la compétence des CAP un grand nombre de décisions individuelles, notamment celles relatives à la carrière.
Pour la CGT, cela remet en cause le principe constitutionnel qui définit les garanties fondamentales accordées aux fonctionnaires, précisées dans l’article 9 du statut général actuel : le droit de participer par l’intermédiaires de leurs délégués dans les CAP à l’examen des décisions individuelles relatives à leur carrière.
- Vous voulez la suppression des CHSCT ? (Article 3)
Les CT et CHSCT sont supprimés et fusionnés dans une instance unique compétente pour l’ensemble des sujets intéressant le collectif de travail : le Comité social d’administration pour la FPE.
Pour la CGT, la fusion CT/CHSCT par la création du « Comité social » aura pour conséquence d’affaiblir et de diluer dans une instance fourre-tout la réflexion, l’analyse et le travail à mener sur des questions très différentes et dont l’enjeu nécessite une approche et des moyens qui ne sauraient être édulcorés. Le maintien de CT et de CHSCT, avec leur propre champ d’intervention sur des enjeux spécifiques clairement identifiés, est essentiel pour la concertation et apporter des réponses constructives.
Alors que les conditions de vie et de santé au travail des agents se dégradent par l’augmentation des charges de travail, les réorganisations permanentes, le manque de reconnaissance et la perte de sens, que les questions d’hygiène et de sécurité sont prégnantes, que des moyens en matière de lutte contre le harcèlement, les violences sexistes et sexuelles sont indispensables, la suppression des CHSCT constitue un recul inacceptable. Supprimer le CHSCT, c’est supprimer ses prérogatives, son budget dédié et ses représentants formés et techniciens, et le rôle essentiel qu’il joue dans la protection, la santé et la sécurité des personnels !
Pour la CGT, afin qu’ils jouent pleinement leur rôle et mènent leur action de prévention auprès des agents, les compétences des CHSCT doivent être renforcées et des améliorations doivent être apportées au fonctionnement et prérogatives des CT.
- Vous voulez des CAP sans droit de regard sur les carrières ? (Article 4)
Le projet de loi recentre les attributions des CAP en les vidant d’une très grande partie de leurs compétences et prérogatives et en bafouant d’un revers de main le rôle essentiel de défense des dossiers mené par les représentants du personnel. L’avis des CAP sera supprimé sur les questions liées aux mutations, aux mobilités, à l’avancement et à la promotion interne. Tout est donc lié pour le gouvernement ! Ne subsisteront donc que les CAP relatives à la situation individuelle (recours, révision du compte-rendu d’évaluation) et à la discipline (cf. art. 15). Le projet de loi prévoit également pour la FPE, des CAP par catégorie hiérarchique A, B et C et non plus par corps (ou grade dans certaines administrations), à l’instar de ce qui existe dans les deux autres versants.
Pour la CGT, les arguments évoqués sont éloquents : il faut « déconcentrer les décisions individuelles au plus près du terrain » et « doter les managers des leviers de ressources humaines nécessaires à leur action ». La traduction est claire : à l’heure des restructurations brutales, des fermetures de services, des abandons de missions publiques, il faut donner toutes les libertés aux employeurs d’en faire à leur guise !
- Vous voulez la fin de l’égalité d’accès aux emplois par le concours ? (Article 6)
Cet article (supprime l’art.14) complète l’article 32 de la loi de 1983 : il précise que le recrutement par la voie du contrat pour pourvoir des emplois permanents (à l’exclusion des emplois de direction) est prononcé à l’issue d’une procédure permettant de garantir l’égal accès aux emplois publics dans les 3 versants. Un décret précisera les modalités qui pourront être adaptées au regard du niveau hiérarchique, de la nature des fonctions ou de la taille de la collectivité ou de l’établissement dont relève l’emploi à pourvoir, ainsi que la durée du contrat.
Pour la CGT, le principe de l’égalité d’accès aux emplois de la Fonction publique conserve toute sa pertinence et constitue un des éléments du socle républicain. C’est pourquoi, la CGT demeure fondamentalement attachée au recrutement par concours, seul vecteur à même d’assurer l’égalité d’accès. Cela ne veut évidemment pas dire qu’avec le concours, tout serait parfait.
- Vous voulez des directions issues du privé et dépendantes des politiques ? (Article 7)
Déjà introduite par le gouvernement dans le projet de loi “pour la liberté de choisir son avenir professionnel”, l’article 7 élargit encore la possibilité hallucinante de nommer des personnes n’ayant pas la qualité de fonctionnaire sur des emplois de direction de la Fonctions publique. Seront ainsi concernés les emplois de direction de l’État et de ses établissements publics.
- Vous voulez des agents précaires et jetables, sous contrat de projet ? (Article 8)
Le gouvernement justifie la création de ce nouveau contrat à durée déterminée afin de permettre la mobilisation de profils divers pour la conduite de projets ou de missions spécifiques. Ce CDD, ouvert à des contractuels, des salariés de droit privé et des fonctionnaires, n’ouvre droit ni à la CDIsation, ni à la titularisation. Il peut être conclu pour une durée maximale de six ans. Il peut être rompu si le projet ne peut se réaliser, ou arrive à son terme, ou se termine de manière anticipée.
En tout état de cause, ces aménagements ne rendent pas ce type de contrat plus acceptable. D’une part, les projets dont il est question ne sauraient être regardés comme isolés les uns des autres et constituent bien des missions permanentes et, d’autre part, ces contrats seront constitutifs d’une précarité sans équivalent.
- Vous voulez la généralisation des recrutements par contrat ? (Article 9)
Dans la FPE, le recrutement des contractuels sera désormais possible sur des emplois de toute catégorie hiérarchique (à l’exception des emplois pourvus par des personnels de la recherche), lorsqu’il s’agit de fonctions nécessitant des compétences techniques spécialisées ou nouvelles, lorsque l’autorité de recrutement n’est pas en mesure de pourvoir l’emploi par un fonctionnaire présentant l’expertise ou l’expérience professionnelle adaptée aux missions à accomplir et enfin lorsque les fonctions ne nécessitent pas une formation statutaire obligatoire à l’entrée dans le corps et préalable à la titularisation de l’agent. Ces contrats pourront être conclus pour une durée indéterminée.
- Vous voulez l’opacité dans les affectations et les mutations forcées ? (Article 11)
Cet article supprime la consultation préalable de la CAP sur les décisions individuelles relatives aux mutations. L’autorité compétente procède aux mutations en tenant compte des besoins du service et des priorités. Elle édicte, dans le respect des priorités définies à l’article 60 modifié de la loi 84-16, des lignes directrices fixant les orientations générales de la politique de mobilité, de promotion et de valorisation des parcours après avis du Comité social d’administration (cf. article 3).
Pour la CGT, la suppression de l’avis des CAP ne fera que restreindre le droit à mutation, laissant le libre arbitre aux employeurs sans contrôle des représentants syndicaux sur le respect des règles. Et ce n’est pas un hasard si cet article est dans le chapitre « donner de nouvelles marges de manœuvre aux encadrants dans le recrutement ». Sur un emploi vacant il sera possible de recruter un contractuel au lieu de muter un fonctionnaire.
C’est la porte ouverte au clientélisme, c’est la fin de règles de gestion nationales clairement établies qui s’appliquent à tous et toutes de façon identique.
- Vous voulez des externalisations de services publics, des détachements d’office, et des transfert vers le privé ? (Article 28)
Le projet de loi instaure, lors d’une externalisation vers le privé de tout ou partie d’une activité assurée par l’administration, un dispositif de détachement automatique des fonctionnaires . Il est détaché d’office, pendant la durée du contrat liant la personne morale de droit public à l’organisme d’accueil, sur un contrat à durée indéterminée auprès de l’organisme d’accueil. Il conserve pendant ce détachement une rémunération au moins égale à celle perçue antérieurement. Les services effectués dans cette position sont assimilés à des services effectifs dans son corps ou cadre d’emploi afin de préserver ses droits à promotion. A la fin du contrat, il peut opter soit pour sa radiation des cadres avec une indemnité, soit pour sa réintégration de plein droit dans son administration d’origine.
- Vous voulez des règles d’égalité professionnelle sans aucune obligation de résultat ? (Article 29)
Mise en place de plans d’action dont l’absence d’élaboration peut être sanctionnée d’une pénalité financière dans la limite de 1 % de la rémunération annuelle globale de l’ensemble des personnels : Ils doivent être établis avant le 31/12/2020 et mis en œuvre dans un délai de 3 ans renouvelables. Ils traitent a minima des écarts de rémunération, de l’égal accès des femmes et des hommes aux corps, cadres d’emplois, grades et emplois, de l’articulation des temps de vie professionnel et personnel, de la prévention et du traitement des actes de violence, de harcèlement moral ou sexuel et des agissements sexistes.
Pour la CGT, le projet de loi minimise la portée contraignante prévue dans l’accord de 2018, en envisageant la pénalité financière seulement comme une possibilité en cas de non-élaboration et mise en œuvre du plan d’action et en prévoyant 3 ans de mise en œuvre renouvelables sans même limiter ce caractère renouvelable.
L’État doit être exemplaire et l’ensemble des employeurs publics doivent être soumis à une obligation de résultat (comme dans le privé) et non seulement de moyens, avec des budgets dédiés. L’ensemble des agent.e.s de la Fonction publique doit pouvoir en bénéficier. Les écarts de rémunération doivent comprendre tous les biais discriminants dont la dévalorisation des métiers à prédominance féminine, les temps partiels et temps non complets, la précarité, les déroulements de carrière.
Mise en place par les employeurs publics d’un dispositif de signalement qui peut être saisi par « tout agent qui s’estime victime d’un acte de violence, de harcèlement moral ou sexuel ou d’agissements sexistes ». Un décret en précisera les conditions d’application. Ce dispositif a pour objet le recueil des signalements et l’orientation vers les autorités compétentes en matière d’accompagnement et de soutien des victimes et de traitement des faits signalés.
Pour la CGT, le projet de loi est insuffisant par rapport à l’accord de 2018, et le décret devra prévoir la mise en place d’un dispositif d’accompagnement, de protection, de traitement et de suivi. Ce dispositif doit également intégrer les situations de violences intra-familiales repérées sur les lieux de travail et la possibilité pour les témoins de signaler les situations de violences sexistes et sexuelles. La CGT revendique également que les CHSCT disposent de davantage de prérogatives sur la question des violences sexistes et sexuelles et le droit pour la victime de prendre part à la procédure disciplinaire, non pas comme témoin mais comme intervenante volontaire avec la possibilité d’être assistée.