A l’occasion de la présentation du projet de réorganisation de l’ESEN en CHSCT et CTAC, deux représentants CGT des personnels se sont rendus à l’ESEN mardi 18 septembre. Près de la moitié des personnels de l’école ont répondu présents, symptôme du besoin d’expression des agents et du mal-être rampant au sein de l’école.
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ESEN : un historique particulièrement lourd
La CGT connaît bien la situation particulière de l’ESEN : ses représentants au CHSCT ont tiré la sonnette d’alarme il y a bientôt 3 ans au sujet de la situation d’une collègue en déclenchant une alerte pour danger grave et imminent. Une délégation du CHSCT s’était rendue à deux reprises sur place et avait auditionné les personnels volontaires. Les constats des membres de la délégation avaient été bien au-delà de la situation individuelle et mis en évidence de véritables problèmes de gestion des ressources humaines et d’organisation du travail : de nombreux collègues se déclaraient littéralement débordés de travail, l’ambiance dans l’école était souvent mauvaise, en partie liée à certains encadrants, et plusieurs collègues se déclaraient en réelle situation de souffrance. Un questionnaire relatif aux conditions de travail a été diffusé dans le service au printemps 2017 et a confirmé les problèmes pointés par l’enquête de la délégation. Cette situation est accentuée par la particularité de l’ESEN qui est un service excentré de l’administration centrale : les collègues qui y travaillent ont peu de possibilité de mobilité interne et se retrouvent souvent « condamnés » à accepter la perspective de rester sur leur poste pour toute leur carrière. Le précédent directeur avait travaillé à un projet de réforme de l’organisation de l’école qui n’a pas été finalement mis en place. La nomination de Bénédicte Robert comme directrice de l’ESEN en janvier 2018 a permis de relancer le chantier de réorganisation. Ajoutons que la nouvelle directrice semble avoir pris la mesure des problèmes RH au sein de l’école et qu’elle a tenté de les intégrer dans son projet de réorganisation.
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Une concertation des agents en demi-teinte
La bonne volonté de la nouvelle directrice s’est notamment manifestée au travers de sa volonté de dialoguer avec les agents sur le projet de réorganisation et de traiter à bras le corps les sujets de difficultés RH. Pourtant quelques mois plus tard, la situation reste très en-deça des attentes des agents, et pour cause ! Le super dispositif de concertation de la direction a malgré tout reposé sur une prise en compte light de la parole des agents… En effet, une réunion d’une demi-journée a été organisée le 8 mars en lien avec l’ARACT, notamment pour présenter les résultats (catastrophiques) du questionnaire RPS et proposer aux agents des ateliers pour réfléchir à l’avenir de l’école et l’organisation du travail. Une demi-journée, c’est extrêmement court ! Pour la suite, le travail s’est fait sans les agents : reprise du projet stratégique de l’école en lien avec la lettre de mission du ministre et en dialogue avec le seul encadrement, commande d’une mission d’appui à l’IGAENR qui n’a interrogé qu’une partie des personnels et pas l’ensemble des personnels volontaires pour témoigner. Surtout, le dispositif que vante la direction a été finalement assez descendant : à partir du mois de mai, la directrice a bel et bien organisé plusieurs ateliers pléniers pour présenter l’état des réflexions, puis a rencontré les agents par petits groupes mais le projet de réorganisation était déjà en grande partie pensé et acté ! C’est dommage et cela a suscité de fortes déceptions…
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Des retours contrastés sur le projet de réorganisation
« Tout ça pour ça… » Cette parole résume à elle seule les retours des collègues de l’ESEN. Il semble y avoir eu beaucoup d’attentes et d’espoirs mis de la part des collègues dans la nomination d’une nouvelle directrice et dans sa volonté de s’attaquer clairement au problème RH de l’école. Pourtant 9 mois plus tard, ces espoirs sont déçus. La déception ne porte pas vraiment sur le projet de réorganisation de l’école en institut : plusieurs collègues ont pris la parole pour dire la fatalité à ce que les structures administratives évoluent et n’avoir pas de problème fondamental à vivre avec cette évolution. En revanche, pour eux cette réorganisation « tombe d’en haut » et leur avis n’ont pas été pris en compte. Surtout cette réorganisation va de pair avec des missions nouvelles pour l’ESEN (nouveau cycle de formation d’auditeurs extérieurs à l’Éducation nationale aux besoins très spécifiques) sans que soient créés le moindre poste supplémentaire, alors même que les collègues sont déjà en surcharge. Et c’est bien sur cette question de la charge de travail et de l’organisation du travail que les collègues sont en attente. C’est notamment vrai pour les assistantes de formation qui s’étaient déplacées nombreuses à l’AG et qui expliquent la complexité de leur métier, avec les modules de formation toujours plus personnalisés qui conduisent à un travail parfois au cas par cas sur les modalités d’accueil des stagiaires. Les collègues soulignent aussi de façon récurrente le flou dans lequel ils se trouvent actuellement, entre une organisation ancienne qui perdure et une organisation future qui commence à se mettre en place, à être anticipée : « nous sommes le cul entre deux chaises ».
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Des attentes sur la charge de travail, les effectifs et la définition des fonctions de chacun
En tant que service de taille réduite et excentré, l’ESEN fonctionne comme un monde en modèle réduit, où les agents sont condamnés à travailler ensemble sur toute leur carrière, même s’ils ne s’entendent pas. Or le mode de gestion des relations humaines qui a prévalu jusqu’ici a conduit à créer énormément de contentieux humains entre les personnels, sans jamais chercher à les apaiser ou les solutionner. Cet historique pèse sur le contexte actuel et prendra du temps à être dénoué. Or dans ce contexte particulier, il est terrible de noter que pour plusieurs agents, l’arrêt pour maladie de la secrétaire générale n’a pas mis fin à l’époque où « ouvrir sa gueule, c’est être placardisé ». Plusieurs agents soulignent qu’ils viennent travailler « la boule au ventre », que les tensions continuent à être présentes. La surcharge de travail pèse sur tous. Il est urgent de recréer à des postes pour alléger la charge de travail des collègues et pour accompagner les nouvelles missions du futur institut.
Un autre point crucial est l’affectation des agents suite à la réorganisation et le travail en cours sur la redéfinition des fiches de poste. Des rendez-vous ont eu lieu entre les chefs de département et certains collègues ne se retrouvent pas dans la proposition d’affectation ou de nouvelles définitions de leur mission qui leur est faite. Certains commentent en disant qu’ils se sentent « dépossédés de leurs dossiers », que des collègues ont fondu en larme en réunions en apprenant qu’ils étaient écartés d’un dossier sans concertation. Interrogée, la directrice de l’ESEN nous a affirmé que rien n’était acté et que tout pouvait encore être discuté, que le travail sur les fiches de poste ne serait mené formellement qu’après l’entrée en vigueur de la nouvelle organisation. Nous avons dit aux personnels de s’engouffrer dans cette parole et que nous étions prêts à assister tous les agents en difficulté dans ce travail de définition des fiches de postes dans la nouvelle organisation. Mais il est urgent de prendre réellement en compte les besoins des agents pour éviter de nouveaux cas dramatiques comme l’école en a connu il y a quelques années !
A ceci s’ajoute de vrais problèmes matériels : le bâtiment est extrêmement bruyant, c’est une « véritable ruche » quand il accueille des stagiaires, c’est-à-dire pratiquement tout au long de l’année. Les postes au niveau de l’accueil sont particulièrement touchés, mais aussi les collègues qui travaillent dans les étages et dont les bureaux donnent sur la mezzanine. Le CHSCT doit urgemment se positionner sur les questions de réaménagement du bâtiment pour permettre aux collègues de l’ESEN de travail dans les meilleures conditions possibles.